Le rapport de la Cour des comptes sur la politique d’immigration irrégulière de janvier 2024, par Tania Racho

Le constat de la Cour des comptes est clair : les dispositifs en place ne sont pas suffisamment organisés.

D’abord, la Cour des comptes rappelle que la majorité des personnes en situation irrégulière sont arrivées en situation régulière, avec un visa par exemple, et différents motifs peuvent expliquer ce changement de statut contrairement à une idée reçue d’arrivée importante en situation irrégulière.

Deuxième constat du rapport, l’idée de « pression migratoire » qui irrigue la politique de lutte contre l’immigration irrégulière est biaisée puisqu’elle dépend du déploiement des forces de police. En effet, plus on met des forces de police dans un lieu et plus on dénombre des personnes qui sont potentiellement en situation irrégulière.

Ensuite dans le rapport on observe qu’il y a une absence de stratégie de la part du gouvernement, particulièrement sur les deux volets de la politique de lutte contre l’immigration irrégulière, à savoir : le contrôle aux frontières et l’éloignement.

Sur le premier volet, il n’y a pas de stratégie à long-terme puisque le contrôle aux frontières intérieures, comme par exemple à la frontière italienne, est supposé être temporaire pour des petits mois, et pourtant c’est un épisode qui dure depuis 2015. Sur la frontière franco-britannique, la Cour des comptes estime aussi que la coordination entre les deux pays est « décevante », ce qui aboutit à des décès réguliers dans la Manche.

Sur l’autre volet de la politique de lutte contre l’immigration irrégulière, la Cour constate que sur l’éloignement la production massive d’OQTF (Obligation de Quitter le Territoire Français) est sans lien avec les flux d’arrivée. Au contraire, cette édiction massive engorge les préfectures et l’absence d’exécution laisse les personnes concernées dans une zone grise. Pour la Cour des comptes, l’engorgement des préfectures est aussi lié au manque de personnel dans les différentes administrations. La conséquence de ce manque de personnel est la multiplication des erreurs et annulation des décisions administratives des éloignements avec comme résultat un sentiment « d’inefficacité globale », toujours selon la Cour des comptes. En matière d’éloignement, la priorité est donnée aux profils qui causent des « troubles à l’ordre public » qui sont majoritaires dans les centres de rétention (CRA) sans que les moyens liés à la sécurité ne soient adoptés.

En revanche, on peut s’étonner de l’absence de mention dans le rapport de la création de situations irrégulières justement par la préfecture, en lien avec les manques d’effectif et à l’impossibilité d’obtenir des titres de séjour que les personnes sont pourtant en droit d’obtenir.

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