Le terme d“Appel d’air” semble s’être imposé dans le débat public aux débuts des années 2000, à l’époque du camp de Sangatte à Calais. L’Etat craignait alors que les associations d’aide aux migrants favorisent par leur action ce fameux appel d’air. Plus récemment, la même critique a été formulée au sujet de l’action des ONG de sauvetage en mer.
Pourtant on a observé que lorsque les sauvetages en mer ont cessé d’être organisés, ce qui était le cas entre 2015 et 2016, les tentatives de traversée de la Méditerranée par les migrant•es se sont poursuivies voire amplifiées.
Durant cette période le HCR l’Agence des Nations unies pour les Réfugiés déplorait une “hécatombe jamais vue en Méditerranée” et l’Organisation internationale des migrations avait relevé que 480 migrants étaient morts en Méditerranée contre 50 dans la même période l’année précédente.
Au niveau des politiques publiques, l’affirmation d’« appel d’air » est fondée sur l’idée que les politiques d’immigration et d’accueil déterminent le choix des individus de migrer. Autrement dit, plus les frontières seraient ouvertes et les conditions d’accueil favorables, plus l’effet incitatif – et donc l’appel d’air – serait fort.
Or cette affirmation est contredite par les travaux de recherche qui montrent que ce sont beaucoup moins les conditions d’arrivée (souvent mauvaises) qui attirent, que la situation dans les pays de départ où se mêlent l’absence d’espoir, le chômage massif des jeunes et parfois aussi la guerre et l’insécurité qui pousse à partir.
A cela s’ajoutent des facteurs individuels, notamment le capital économique et social. Cris Beauchemin, démographe, rappelle ainsi qu’en majorité, ce sont les personnes les plus favorisées qui arrivent en Europe et en France.
Plusieurs autres facteurs tels que la préexistence de réseaux de solidarité au sein des diaspora, les réseaux sociaux ou encore la langue parlée déterminent fortement les trajectoires migratoires et le choix de se rendre dans tel ou tel pays.
Pour conclure, les mesures prises par les gouvernements pour prévenir ce supposé « appel d’air », telles que la dégradation des conditions d’accueil ou la réduction des voies de migrations légales, ont surtout pour effet une atteinte aux droits et à la dignité des personnes.