La naturalisation (1/3), par Catherine Wihtol de Wenden

Beaucoup des idées reçues gravitent autour de l’idée selon laquelle on serait dans un pays de droit du sol où la nationalité serait très facilement donnée. C’est évidemment faux.

Le droit de la nationalité en France est un équilibre entre le droit du sol et le droit du sang, équilibre qui existe depuis 1889. Très rapidement, il convient de rappeler que la France de l’Ancien Régime était un pays de droit du sol puisque les serfs étaient initialement liés aux territoires du seigneur. Pendant la Révolution Française, notamment par les philosophes des Lumières, il est apparu que le droit du sang était plus libérateur du lien que le droit du sol. C’est une des raisons pour laquelle le Royaume-Uni, qui n’est pas passé au droit du sang, est resté sur le droit du sol.

Presque tous les pays européens possèdent le même système que la France en matière d’équilibre entre le droit du sol et le droit du sang pour « absorber » plus rapidement les populations migrantes. Le pays qui a longtemps résisté à cet équilibre est l’Allemagne puisqu’il est resté attaché au droit du sang jusqu’à une réforme survenue en 2000. En France, au contraire en 1889 on abandonne le « tout droit du sang » du Code Civil napoléonien pour adopter plus de droit du sol et ainsi, ce qu’on appelait à l’époque, « faire plus de Français avec les étrangers » dans un contexte de déclin démographique et notamment de préparation d’un éventuel, qui arrivera, conflit « franco-allemand ».

Ensuite, on a observé toute une série de débats autour de savoir s’il fallait restreindre ou élargir le droit de la nationalité. Je rappelle que la plupart des réformes sur le droit de la nationalité depuis 1889 ont été dans le sens d’un élargissement vers plus de droit du sol ; ça a été le cas en 1927, en 1945, en 1973.

La première fois que l’on commence à imaginer une restriction de la nationalité c’est avec le Comité des Sages qui s’est réuni en 1989 sur la restriction du droit à la nationalité. Pour autant, ces vifs débats très politisés n’ont pas mené à une réforme. L’extrême-droit était très attachée à ce sujet puisqu’il y avait eu le Club de l’horloge qui dénonçait l’existence de « Français de papiers », qui seraient Français malgré eux. L’extrême-droite était également hostile à plus de droit du sol.

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