L’impact sur le marché du travail de la migration : perceptions et réalité par Benjamin Michallet

Quel est l’impact des migrations sur le marché du travail des pays hôtes ?

Pour répondre à cette question, la recherche en économie a bien souvent mobilisé les exodes massifs. L’exemple le plus connu est celui mobilisé par le prix Nobel d’économie David Card qui, dans un article de 1990 s’intéresse à l’exode de quelques 125 000 Cubains considérés comme contre-révolutionnaires par Fidel Castro qui vont quitter l’île de Cuba entre avril et octobre 1980 par la mer pour rejoindre la région de Miami. David Card compare l’évolution des salaires et de l’emploi à Miami entre la période juste avant l’exode et juste après l’exode par rapport aux mêmes évolutions d’autres villes aux caractéristiques proches mais non touchées par ce flux de travailleurs. Ses résultats indiquent l’absence d’impact sur l’emploi et le salaire des non-Cubains comme sur l’absence d’impact sur l’emploi et le salaire des Cubains présents précédemment.

Ces travaux vont être discutés par George Borjas en 2019, l’un des meilleurs spécialistes de l’économie des migrations, qui va nuancer ces résultats en se focalisant sur les moins diplômés. Néanmoins, Peri et Yasenov, en 2019, vont finalement confirmer l’absence d’impact sur les non-Cubains les moins diplômés.

Ces résultats sont globalement confirmés dans le temps et l’espace. Semih Tumen s’intéresse en 2017 à l’impact de l’exode massif de Syriens dans les régions frontalières de Turquie et conclue en l’absence d’impact significatif. Un article très intéressant de Foged et Peri de 2016 s’intéresse plus en détail à la compétition potentielle des immigrants les moins éduqués avec les travailleurs locaux. Là encore, leurs travaux indiquent une absence de compétition. Mieux, les travailleurs locaux changeraient de poste pour des métiers moins manuels et les auteurs concluent en l’absence d’effets négatifs sur les salaires.

Pour conclure, j’évoquerai les résultats très récents d’Aselmann et ses co-auteurs dans le cas du Chili. Alors même que les auteurs montrent l’absence d’impact sur le marché du travail des exodes massifs qui ont eu lieu vers le Chili, ils documentent une mauvaise perception des travailleurs locaux sur l’impact réel sur le marché du travail.

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